Le faire "à bloc," ou ne pas le faire "à bloc", tel était le dilemme shakespearien avant de s'élancer sur le parcours du prologue. Cinq cents mètres après la ligne de départ, coincé entre un bus rouge à deux étages et précédé par un chauffeur de taxi irascible, j'ai opté rationnellement pour la prudence!

Le parcours est une splendide carte postale de Londres : on salue Big Ben, on file devant Buckingham Palace où les gardes ne perdent pas leur légendaire aplomb, on pédale dans le vert britannique de Hyde Park entre les écureuils malins.

Mais on apprécie tout cela d'un œil tout simplement parce que l'autre cherche à éviter les pièges qui sont partout : l'asphalte huileux glisse, les virages sont secs, la circulation est chaotique (euphémisme) et surtout on roule à gauche.

Quant au vent capricieux qui balaye la capitale ces jours-ci, il vous déporte parfois d'un demi-mètre en une rafale au coin d'un pub. Le cycliste est d'ailleurs un animal rare à Londres : à l'exception des coursiers à vélo qui risquent leur santé dans le smog et leur vie à tous les carrefours, on ne trouve presque aucun cycliste amateur.

Les pistes cyclables sont étroites, rugueuses et peu respectées dans la jungle du trafic. Toutes les équipes professionnelles du Tour ont d'ailleurs décidé de loger dans les environs.

Après 8 km dans ces conditions infernales on se félicite d'être encore sain et sauf ! Mais notre Tour, "l'autre Tour", a enfin commencé.

En réalité, il avait déjà débuté le jeudi soir, quand deux inspecteurs de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) ont frappé à la porte de ma chambre à 20 h 06.

Il m' a fallu une heure vingt pour terminer tout le protocole des tests sang et urine.

On vous demande de choisir les éprouvettes, de contrôler les étiquettes, de fermer vous-même les flacons A et B et l'inspecteur zélé pose son menton sur votre épaule quand vous fournissez votre mixion pour s'assurer que tout se fait dans les règles…

Ensuite il vous prélève 4 éprouvettes de sang frais : une expérience unique qui permet de se mettre dans la peau d'un coureur ou mieux, sous la peau d'un coureur.